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347ème article : "Vademecum personnel sur la procédure disciplinaire." 1ère partie

Vademecum personnel sur la procédure disciplinaire.

 

Il existe un certain nombre de vade-mecum relatifs à la procédure disciplinaire, que vous trouverez en liens en fin d’article, mais j’ai voulu m’attacher au sens de cette procédure et insister sur le côté « professionnel » quant à son « approche », côté qui doit être distant ou le rester, de « l’affectif » ou du « pédagogique ».

L’affectif car dans cette procédure, l’instructeur, à savoir le chef d’établissement, est en contact permanent avec aussi bien les élèves « fautifs », que les éventuels « lésés » mais aussi les membres du conseil de discipline. Ce qui est totalement inédit dans nos règles de justice.

Pédagogique car la punition en général, fut-ce la plus grave comme la détention de longue durée, permet, en théorie, de faire comprendre et donc ce serait un acte « pédagogique » de façon intrinsèque. « Rendre justice, c’est d’abord et avant tout punir, c’est-à-dire répondre à une injustice par une souffrance dont on attend qu’elle répare, voire efface l’injustice et restaure ainsi la justice. La représentation classique de la Justice ne la symbolise-t-elle pas par deux attributs nettement reconnaissables : la balance et le glaive ? Si la balance symbolise immédiatement à nos yeux l’idée d’égalité à travers l’image de l’équilibre, le glaive, lui, symbolise la force dont fait preuve l’institution judiciaire quand elle punit et châtie. »

Le droit scolaire qui est nouveau et remonte à peu de temps, et a été concrétisé par la récente publication du Code de l’Éducation, en juin 2000. Publié au Journal Officiel en juin 2000, il a depuis pleinement force de loi. Il se substitue aux lois antérieures sur l’éducation, dont la plupart sont abrogées par l’ordonnance qui instaure le présent Code. Il devrait désormais servir de référence à toute révision législative ultérieure. La ratification et la mise à jour du Code de l’éducation ont été parachevés par la loi n° 2003-339 du 14 avril 2003. L’apparition de ce « droit scolaire » a fait du chef d’établissement un « professionnel » de la justice scolaire et ses décisions doivent donc être des décisions attendues de tout professionnel et donc peuvent être soumises à des procédures de « non-lieu », « d’appel » voire de « recours ».

Depuis juin 2000, les recommandations diverses, rappellent que le droit scolaire doit être au plus près du droit « commun ». Le Code de l’Éducation ne comprend pas moins de 1511 pages d’articles auxquelles se rajoutent en permanence, des jurisprudences qui viennent affiner ou préciser le droit.

https://codes.droit.org/PDF/Code%20de%20l%27%C3%A9ducation.pdf

Claude Allègre, déclarait : « Il faut faire de l’école un territoire de droit commun. » Ce fut donc le début de la judiciarisation des conflits scolaires notamment pour la partie de cet article. L’école, espace public et institution d’État, ignorerait le droit commun. Deux temps distincts s’imposaient : un premier moment pour restituer l’essentiel du Bulletin officiel, un second pour rappeler les principes du droit. Le ministère travaillait sur les réformes annoncées et telles que le Bulletin officiel lui-même les énonçait alors : principe de la légalité des sanctions et des procédures, principe du contradictoire, principe de la proportionnalité de la sanction, principe de l’individualisation de la sanction :

La réforme prévoyait (également) la mise en place d’une échelle des sanctions qui combine les principes de légalité et de proportionnalité. Elle distinguait notamment les sanctions disciplinaires (pour manquement aux obligations de l’élève) qui sont du ressort du Conseil de discipline, et les punitions scolaires (pour manquements mineurs aux mêmes obligations) qui relèvent des enseignants. Mais dans un cas comme dans l’autre, le principe de légalité exige qu’aucun acte ne puisse faire l’objet d’une sanction qui n’ait été expressément visée par la loi.

Le règlement intérieur devenait à son tour, une institution, traduction de ce mouvement de l’école vers un « droit disciplinaire ».

Cela dit en préambule de ce vade-mecum, je vais faire un certain nombre de parallèles entre les procédures scolaires et les procédures de droit commun.

Le Principe de l’égalité des citoyens devant la loi se traduit simplement par l’égalité des élèves devant le Règlement intérieur de l’établissement et l’égalité devant tous les textes supérieurs qui s’appliquent à lui. La connaissance de ces différentes « obligations » fait, en théorie, l’objet d’études et de commentaires au sein même de la classe, ou de l’établissement via le travail du CPE. On voit comment une tendance à la juridicisation du champ disciplinaire peut se doubler d’une pédagogie ouverte au droit.

« Une école qui ne veut pas seulement distribuer des compétences professionnelles, mais aussi former un citoyen autonome, peut-elle ignorer le langage juridique, alors qu’il est de plus en plus évident que l’accès à la citoyenneté passe par l’accès au droit et la capacité de chacun à mobiliser des règles, à solliciter des conseils, à s’orienter dans un environnement procédural et à mettre en mouvement des normes partagées » T.Pech Enseignant chercheur à l’institut des hautes Études de la Justice. Paris.

C’était un petit détour, juste pour motiver ma « sentence » à savoir un Conseil de discipline n’a pas à être « pédagogique » car la notion de « connaître », « savoir et respecter », « enfreindre et réparer », font partie des « enseignements » du système éducatifs et des « compétences » à acquérir. Mais au-delà de la simple information, il s’agit d’obtenir l’adhésion des élèves, leur engagement, pour que les règles communes ne soient pas vécues comme des contraintes, mais comme les conditions du vivre ensemble : l’interdiction de toute violence n’est pas une privation, mais une protection ; l’assiduité n’est pas une brimade, mais la condition nécessaire (bien que non suffisante) de la réussite.

Entrons enfin dans le vif du sujet :

« Nullum crimen, nulla pœna sine lege » ou plus simplement « [il n'y a] aucun crime, aucune peine, sans loi ». Si on ne parle pas de crime à l’École ; ce principe est clair et s’applique dans son sens que « nul ne peut être sanctionné s’il n’y a pas d’obligations ou d’interdictions qui l’oblige ou l’interdise.

Le chef d’établissement est rarement « témoin direct » d’un incident scolaire mais est le récepteur soit d’un relevé d’incident établi par un professeur, un élève, la vie scolaire, tout autre membre du personnel de l’établissement. En droit commun, on pourrait assimiler ce moment à celui du dépôt d’une plainte ou d’une main courante. Pour le chef d’établissement comme le fonctionnaire de police, il convient de « l’enregistrer » et de savoir si la « plainte » est recevable. Recevable en ce sens que le motif relève d’une « infraction » au règlement intérieur ou à d’autres dispositions qui lui sont supérieures. C’est ici que l’on parle de la « caractérisation des faits ».

Un chef d’établissement, comme dans le droit commun, peut classer l’incident « sans suite » mais il doit le motiver, par écrit, à celui qui lui en a fait part. (fin de la première partie. A suivre …)

Suite partie 2     

Les procédures de la sanction : Procédure induit les mots comme « procédurier », « procédurière ». Dans ces mots sont sous-entendus les termes de « rigueur » et « technicité ». Ce sont ces deux axes qui seront « scrutés et vérifiés » si, d’aventure, les décisions prises sont « contestées » et comme l’on dit « qu’il soit fait grief ».

Comme dans le droit commun, il peut-il y avoir dans le droit scolaire de deux types de constats quand il y a un manquement à la « règle », le constat dit de « flagrance » et celui de faits rapportés ou constats établi par un tiers. Dans le droit commun le constat de flagrance établit des règles rapides, voire immédiates pour faire cesser le trouble à l’ordre.

C’est ce que l’on retrouve dans le Code de l’Éducation, pour les cas de violence à l’égard des personnels notamment.

« 12° Il [le Chef d’établissement] engage les actions disciplinaires et intente les poursuites devant les juridictions compétentes.

A l'égard des élèves, il est tenu, dans les cas suivants, d'engager une procédure disciplinaire, soit dans les conditions prévues à l'article D. 454-12-1, soit en saisissant le conseil de discipline :

a) Lorsque l'élève est l'auteur de violence verbale à l'égard d'un membre du personnel de l'établissement ;

b) Lorsque l'élève commet un acte grave à l'égard d'un membre du personnel ou d'un autre élève ;

c) Lorsque l'élève commet un acte portant une atteinte grave aux principes de la République, notamment au principe de laïcité ;

d) Lorsque l'élève commet des faits de harcèlement, notamment de cyberharcèlement, à l'encontre d'un autre élève, y compris lorsque ce dernier est scolarisé dans un autre établissement.

Il peut prononcer sans saisir le conseil de discipline les sanctions mentionnées à l'article R. 511-15, ainsi que les mesures de prévention, d'accompagnement et les mesures alternatives aux sanctions prévues au règlement intérieur. »

Le chef d’établissement, par les textes, et notamment en vertu de l’Article D454-12 n’a pas le choix de la procédure, elle lui est réglementairement imposée. De ne pas la ou les engager peut conduire les personnes victimes de ces violences, ou leurs représentants légaux si elles étaient mineures, à faire « grief » contre le chef d’établissement, représentant de l’État, dans l’EPLE. C’est ce que l’on a vu dans de récentes affaires où une directrice d’école se retrouve en mesure conservatoire de suspension de 4 mois renouvelable et dans des affaires de harcèlement. Donc les parents, comme les enseignants et toute personne victime de violence peuvent saisir la justice administrative en cas de « non-action ». C’est ce que l’on appelle « la requête ».

Détail d’un récent jugement en T.A dans une affaire aussi traitée au pénal : «  Considérant qu’il résulte de l’instruction et n’est pas sérieusement contesté en défense que plusieurs intervenants au sein de l’établissement ont eu connaissance individuellement des faits et agissements dont B Z a été victime, et dont le caractère a été répété, fréquent, varié, intense et prolongé dans le temps ; que, nonobstant le caractère parcellaire de l’information que ces derniers pouvaient en avoir, et quand bien même certaines initiatives auraient-elles été prises, l’absence de procédure de concertation pour prendre en considération la souffrance d’un élève, avec comme corollaire l’absence de mise en œuvre d’une procédure de prise en charge idoine, révèle une défaillance dans l’organisation du service ; qu’une telle carence dans l’appréhension du harcèlement moral au sein d’un établissement, et en particulier celui dont a été victime B Z, est de nature à engager la responsabilité de l’Etat, tant en raison du préjudice propre des membres de la famille du fait du décès, qu’en raison de celui subi par l’enfant durant sa scolarité ; ».

C’est en cela que je fais, non pas une critique, mais une ou des remarques quant à l’utilisation des vade-mecum publiés par des services académiques qui pêchent parfois par manque de professionnalisme. En tout cas ; ils ne peuvent être utilisés de façon « mécanique ».

Hors de la « situation de flagrance » il y a les manquements à la règle, pour parler très généralement et bien souvent les points de départs sont des faits rapportés comme un rapport d’un professeur, ou un rapport d’un membre du personnel, ou une plainte d’élèves ou d’un élève ou des constats faits par un service de l’EPLE comme ceux relatifs à l’absentéisme scolaire par exemple.

Le chef d’établissement reçoit le signalement du fait. Il a la position du procureur, à savoir qu’il doit décider, dans des délais malheureusement courts et encadrés par le Code de l’Éducation, quant à « la suite à donner ».

Les choix qui s’offrent à lui :

  • Il n’y a pas de suites à donner car les faits ne correspondent pas à des interdictions ou prescriptions connues, légales, réglementaires (le R.I) et je vous renvoie à l’adage « Nullum crimen, nulla pœna sine lege ». C’est souvent le cas par exemple du non-respect des règles dites « en droit » rituelles. Ces dernières renvoient au pouvoir de « punition » dont aurait pu user l’auteur du rapport s’il est membre du personnel par exemple. Citons les cas des élèves qui n’ont pas leurs affaires, ont oublié de rendre un devoir, se lèvent pile à la sonnerie sans prendre en note …. Etc.  Le Code de l’Éducation stipule que « Lorsque ce dernier, saisi par écrit d’une demande de saisine du conseil de discipline émanant d’un membre de la communauté éducative, décide de ne pas engager de procédure disciplinaire, il notifie par écrit à l’intéressé sa décision de refus motivée. Article D511-30

 

  • Les faits ne relèvent pas d’un non-respect des règles rituelles et le chef d’établissement va devoir se lancer, en peu de temps, dans un circuit qui pourtant est bien long. D’autant que tout au long de ce circuit, il va cumuler, ce qui est une « rareté » dans notre façon à s’organiser, de procureur, magistrat instructeur, Président du conseil de discipline et avocat général. Pour faire rapide, être juge et partie.

 

« Tout manquement à l’une des obligations que la loi assigne aux élèves ou aux modalités que le règlement intérieur de l’établissement a fixées peut ou doit conduire à l’engagement d’une procédure disciplinaire, quel que soit le lieu où la faute a été commise, la qualité d’élève étant déterminante. »

Il est à noter que la procédure disciplinaire à engager relève de la compétence du chef d’établissement dans lequel l’élève est inscrit. (cas de manquement à la règle dans l’établissement X où l’élève d’un établissement Y était ou s’est rendu par exemple). https://www.legifrance.gouv.fr/codes/article_lc/LEGIARTI000039016548

 

Pour autant il n’est pas seul et c’est à lui de répartir ces différentes « fonctions » entre les personnels qui composent l’équipe de l’établissement : le chef d’établissement adjoint quand il y en a, le CPE professionnel de la vie scolaire notamment.

Le chef d’établissement aura donc tout intérêt à réunir rapidement ce groupe informel dans son établissement. De cette réunion rapide, le chef d’établissement pourra diligenter ce qui s’apparente à une enquête, en droit commun, de recueillir les éléments en rapport avec le signalement qui lui a été fait, afin de prendre une décision.

Pour cette décision on aura tout intérêt de se référer aux articles du Code de l’Éducation du R511-12 à R511-17

Fin du 1er épisode.

 

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